mardi 21 mai 2013

Fantômas (5 ép.) de Louis Feuillade



Présentation
En cinq épisodes tournés en 1913 et 1914, les aventures du terrible criminel Fantômas, portées à l’écran par Louis Feuillade, dans un serial muet interrompu par la guerre. L'inspecteur Juve comprend bien vite à quel génie du crime il a affaire, mais jamais il ne renonce, aidé par le jeune Fandor, journaliste intrépide.

Mon avis
Je n’avais jamais vu ce serial des années 1910, qui s’est emparé « à chaud » d’un grand succès de la littérature populaire, et j’appréhendais quelque peu l’expérience, me disant que cela faisait bien longtemps que je n’avais pas regardé de films muets. Je craignais de m’ennuyer, les rythmes de nos fictions cinématographiques ayant bien changé ; je craignais aussi de trouver le jeu des acteurs désuet jusqu’au ridicule. Je me suis lancée…
Et j’ai été soufflée !
Je ne saurais juger de la fidélité aux récits de Pierre Souvestre et Marcel Allain (j’y viens, j’y viens), mais j’ai tout de suite été emportée par l’atmopshère. On est très loin de l’image donnée par les films de Hunnebelle dans les années 1960 : par exemple, l’inspecteur Juve n’est pas l’abruti hystérique proposé par Louis de Funès, mais un type acharné et malin, qui comprend bien avant tout le monde quel criminel abominable est Fantômas. Fandor est un peu plus falot, même s’il prend de l’importance au fil des épisodes : il a un petit côté Tintin avant l’heure. Et que dire de Fantômas, incarné par René Navarre ? Regard magnétique, ruses diaboliques, c’est un vrai génie du mal comme on aime, et on ne s’embarrasse pas ici de donner quelque explication que ce soit. Fantômas est cupide, certes, mais il a aussi une vraie jubilation à faire le mal pour rien, gratuitement, il n’a aucune morale, aucune pitié, il piège ses acolytes avec la même absence de scrupules que lorsqu’il s’en prend aux nantis.
Le jeu des acteurs a beau être emblématique du muet, il n’a rien de la pantomime qu’on pouvait voir alors sur les écrans. Le jeu de Navarre est même assez moderne. Non seulement je ne me suis pas ennuyée, mais ce qui peut nous apparaître désuet m’a fait sourire, et j’ai même trouvé que ces cinq films avaient un sacré rythme. Pour tout vous dire, j’ai dévoré l’ensemble en un week-end, c’était addictif !
Enfin, faut-il que j’enfonce des portes ouvertes ? Louis Feuillade a contribué à inventer le langage cinématographique. J’ai été frappée par les nombreuses scènes en extérieur, qui s’échappent des décors un peu théâtraux du muet. Les scènes dans la nature sont réussies, mais j’avoue avoir été touchée par les scènes de rue dans la capitale : voir le Paris d’avant la Grande Guerre, d’avant la grande boucherie, est bouleversant. Même les scènes en intérieurs sont intéressantes : Feuillade réussit souvent à donner du mouvement – alors que les plans sont bien sûr fixes.
Maintenant, je n’ai qu’une envie, voir Les vampires, avec la somptueuse Musidora. Et je ne serais pas contre la lecture de quelques Fantômas. Et ça tombe bien, parce que sort bientôt dans la collection Bouquins (Robert Laffont) une nouvelle édition des récits de Pierre Souvestre et Marcel Allain : il était temps !


Pour qui ?
Pour tous ceux qui sont prêts à voir une page de l’histoire du cinéma ou qui ont pour seule image de Fantômas un type à la tête bleue...

Le mot de la fin
Historique.

Louis Feuillade, Fantômas, Juve contre Fantômas, Le mort qui tue, Fantômas contre Fantômas, Le Faux magistrat, Gaumont, 1913-1914. Disponible en coffret, Studios Gaumont, 2008. 

3 commentaires:

Brize a dit…

Eh bien, tu réussis à me donner envie de voir des films muets : un tour de force !

Brize a dit…

(j'ai oublié de dire que ça complèterait bien ma lecture de "Masqué"!

Tasha Gennaro a dit…

J'ai discuté avec le scénariste de La colère de Fantomas, Olivier Bocquet, il y a quelques jours, et il a bien entendu évoqué Masqué. Il faut que je le lise! Quant aux films muets, je ne sais même pas à quand remonte mon dernier film muet...